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À propos

La première colocataire c'est moi, Johanna !

C’est Moi … Avez–vous déjà entendu quelqu’un dire sur un ton joyeux « Moi , j’ai toujours 20 ans ». Et bien Moi, j’ai toujours 3 ans (dit par les spécialistes) et cela fait 40 ans que ça dure.

Personnellement suivant mes rencontres, je me donne des âges différents : en général 7 ans et demi, c’est mon âge préféré, mais comme je vois à cette annonce souvent de l’étonnement, je cherche quel âge je pourrai bien inventer. Pourquoi pas 22 ans. Pourquoi ? Parce que les « TR … » de TRente ou de TRois ou de quaTRe sont difficiles à prononcer, j’évite donc de les utiliser. Apparemment, 22 ans ça passe, si personne ne me contredit. Donc à trois ans j’ai fait ma première et dernière rentrée scolaire.


Ce n’était pas évident : tout mon entourage s’inquiétait. Je suis vite passée de l’école à l’hôpital de jour puis en IME puis en FAM. J’ai vécu des expériences parfois extraordinaires et parfois très douloureuses, c’est pourquoi je ne vous en parlerai pas davantage. Ce cahoteux chemin s’est enfin terminé lorsque mes proches ont pris conscience que ma régression était devenue trop importante. Quand il parlait « d’un légume » ce n’était pas de moi dont ils parlaient mais de l’état dans lequel il m’avait retrouvé.


Ma vie alors a commencé : de retour au foyer familial, j’ai repris des forces. On a commencé par changer notre alimentation ce qui m’a permis de pallier d’abord à mon anémie et plus tard à mon eczéma. Toute la famille en a bénéficié même ceux qui étaient sceptiques.

Une petite pièce a été transformée en salle d’activités et doucement j’ai retrouvé la joie de vivre. Tous mes intervenants ont été extraordinaires. J’avais pris en compte leurs spécialités et quand ils arrivaient je savais déjà si j’allais faire du sport, un puzzle, ou écouter une belle histoire. Ils me laissaient le choix mais je savais ce qui leur faisait aussi plaisir. Il y avait une certaine connivence entre nous. Je n’étais plus un « légume » et je découvrais justement pourquoi j’étais différente. Je n’avais pas conscience de mon corps. C’est d’ailleurs encore le cas.


Mon audition est tellement sensible que j’entends le moindre aboiement au lointain. Par contre, je me bouche les oreilles au cinéma surtout lors des annonces publicitaires. Le ton est si important pour moi que je n’arrive pas à écouter les paroles. Si c’est trop haut c’est qu’on me gronde. Quand c’est doux j’attends la suite de la phrase. Si on me parle en catimini, lentement, dans les yeux je suis en capacité de répondre. C’est pourquoi il m’est difficile de fréquenter des lieux bruyants .


Je suis aussi particulièrement touchée par le regard des autres. Ils peuvent être la cause d’une soudaine hilarité, d’une crise de larmes ou même d’une apparition de toques : je ferme pratiquement les yeux et j’ouvre ma bouche pour pouvoir mieux respirer. Là c’est l’horreur, je ne passe pas inaperçue alors que c’est vraiment mon souhait. Les difficultés que je rencontre sont de plus en plus constatables et donc compréhensibles pour mon entourage.


Ce nouvel accompagnement m’a permis de développer mon langage. Les mots puis les phrases se sont multipliées d’une année sur l’autre. J’ai même annoncé que je voulais devenir MAITRESSE. A leurs sourires, j’ai bien compris que cet objectif serait très difficile à atteindre; surtout quand ils m’ont expliqué qu’il fallait d’abord que je sache lire, écrire et compter. Pourtant à force de me faire commander, j’avais déjà une idée du ton qu’il fallait prendre pour enseigner.


En tous cas je peux vous dire tout ce que ma famille a appris grâce à moi : S’ils s’intéressent autant aux magazines de santé c’est bien grâce à moi. S’ils se sont tant formés sur internet c’est aussi pour moi. S’ils ont modifié leur alimentation et qu’ils ont apprécié de l’avoir fait, c’est grâce à qui ? S’ils font des efforts pour être plus patients, plus doux , plus tolérants, c’est grâce à qui ? Si leur entourage est devenu aussi chaleureux c’est que grâce à moi tout a changé dans leur vie et en mieux.

Quand les gens les plaignent, moi je sais qu’ils ne sont pas malheureux, ils ont seulement peur de mon avenir sans eux.


Alors, aujourd’hui, ils se battent pour que ma vie reste identique et même plus belle que celle que j’ai aujourd’hui.


Ils me voient dans ma maison, déjà équipée d’une belle salle de jeux, avec deux copines.

Nous serions accompagnées comme je le suis aujourd’hui.


Pour MOI c’est à voir.

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(Texte écrit par Ena Marie-Ange à travers ma vision du vécu de ma fille Johanna)

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